Durant cette période spécifique de COVID-19, la crainte du licenciement économique est renforcée. Bien sûr, la crise sanitaire ne justifie pas à elle seule le recours au licenciement économique. En revanche, les conséquences de cette crise, comme la cessation d’activité ou les difficultés économiques des entreprises (baisse des commandes et de chiffres d’affaire, ou dégradation de la trésorerie), peuvent justifier des ruptures de contrat de travail.
Que dit le Code ?
Le recours au licenciement économique reste très encadré. D’abord, l’article L.1233-3 du Code de travail décrit les difficultés économiques qui peuvent être à l’origine de ce type de licenciement. En cas de contentieux, si l’entreprise ne justifie pas de telles difficultés, le licenciement risque d’être qualifié de « licenciement sans cause réelle et sérieuse », ce qui vaudra l’octroi de dommages et intérêts pour le licencié.
Ensuite, l’article L.1233-4 du même Code fait du reclassement de l’employé dans un autre poste une condition préalable pour attester du bien-fondé du licenciement pour motif économique. A ce titre, tous les efforts de formation et d’adaptation doivent avoir été réalisés par l’employeur au moment du licenciement du salarié.
Le licenciement économique ne doit être envisagé que lorsque le reclassement de l’employé « ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ».
En principe, ce reclassement doit se faire sur un poste équivalent à l’ancien poste du salarié ou à rémunération similaire, mais peut, sous réserve de l’obtention de l’accord expresse de l’employé, se faire sur un poste d’une catégorie inférieure.
Et concernant la jurisprudence ?
Récemment, la chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé les pourtours de l’obligation de reclassement.
Dans son arrêt 09 septembre 2020, elle censure la décision de la cour d’appel de Grenoble, et rappelle que la disponibilité d’un poste s’apprécie au moment du licenciement économique. Dans ce litige, un salarié avait été licencié pour motif économique. Or, deux jours après la rupture de son contrat, l’entreprise avait publié une offre d’emploi correspondant aux compétences du salarié licencié.
Les juges du fond, pour déclarer que le licenciement du justiciable était fondé sur une cause réelle et sérieuse, affirmaient que les possibilités de reclassement s’appréciaient au plus tard à la date de licenciement, et que, en l’espèce, le poste avait été pourvu après le licenciement. Cependant, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt de la cour d’appel en rappelant que, quand bien même le poste ait été pourvu après le licenciement, les juges du fond devaient vérifier que ce poste n’avait pas été rendu disponible avant le licenciement.
Une affaire portée devant la Cour de cassation le 1er juillet 2020 rappelle également deux principes clefs de cette obligation de reclassement : la recherche d’un reclassement dans le groupe doit être personnalisée et le reclassement préalable ne doit pas être confondu avec un recrutement.
D’une part, la Haute juridiction estime qu’en l’espèce, l’employeur avait bien adressé les informations nécessaires sur ses salariés aux autres entreprises du groupe pour permettre leur potentiel reclassement. Elle s’appuie sur le fait que la lettre de demande de recherche de postes de reclassement « comportait un tableau récapitulant par département de l’entreprise, l’emploi occupé par les salariés à reclasser et le nombre de salariés concernés pour chacun de ces emplois ». Selon la Cour, ces informations permettent de caractériser une recherche suffisamment personnalisée. D’autre part, les propositions de reclassement doivent être définitives.
En l’espèce, les juges du fond estimaient que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse car les propositions de reclassement non définitives, puisqu’elles étaient subordonnées à un entretien avec un supérieur hiérarchique à l’issue duquel une offre ferme d’emploi pouvait être adressée par le directeur des ressources humaines de l’entité d’accueil. Or, la Cour casse et annule cet arrêt en arguant que l’entretien n’était qu’une faculté offerte au salarié, qu’il ne s’agissait pas d’une étape obligatoire du processus de recrutement.
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